Dans l'atelier de l'orfèvre bijoutier

 
 
 
 
 
 

« Des éclaboussements d'étincelles partaient sous les marteaux, rayonnaient comme des soleils au ras des enclumes »

Émile Zola, L'Assommoir, 1878.

Représentation d Représentation d'une boutique d'orfèvrerie Représentation d'une boutique d'orfèvrerie Représentation d’une boutique où plusieurs ouvriers sont occupés à divers ouvrages de bijouterie,
Gravure d’après l’Encyclopédie…, Diderot et d’Alembert, 1751-1780, vol.7, pl. I, Orfèvre Bijoutier.
Fiche de ce document
 

Le terme « atelier » désigne à la fois le lieu de travail de l'orfèvre et le système d'organisation de la pratique professionnelle. L'atelier se compose généralement d'un maître qui travaille avec des apprentis, des compagnons, des engagés ou des associés. La stabilité de la profession est assurée par les besoins du marché. L'orfèvre crée, fabrique, assemble et vend. Dans certains cas, l'atelier comprend donc une boutique, lieu de vente qui jouxte celui de la fabrication. Au XIXe siècle, la boutique est décrite comme un espace d'exposition et de vente, généralement situé au rez-de-chaussée, tandis que l'atelier est le lieu où travaillent artistes et artisans. Sous l'Ancien Régime, la prévalence des termes boutique et magasin à celui d'atelier indique que l'orfèvre était surtout considéré comme un artisan et un marchand.

L'histoire de l'orfèvrerie est assez peu marquée par les évolutions technologiques si bien qu'au XIXe siècle, l'atelier d'un bijoutier diffère très peu de ceux décrits par Diderot et d'Alembert sur les planches de l'Encyclopédie au cours de la deuxième moitié du XVIIIe siècle. En effet, à l'exception de l'industrialisation de certaines productions, les artisans orfèvres utilisent les mêmes outils et réalisent les mêmes gestes depuis l'Antiquité.

L'atelier est généralement éclairé par de larges ouvertures permettant à la lumière, élément indispensable, de pénétrer. L'orfèvre travaille le plus souvent assis, sur un tabouret, devant l'établi de mise en œuvre, l'un des meubles les plus importants de l'atelier qui est très souvent placé sous les fenêtres. Autour de l'établi en bois, chaque place est incurvée et des tabliers de peau sont tendus sous les échancrures face aux ouvriers, pour récupérer les poussières de métal précieux et les éclats de pierres. Au centre, un tasseau est fixé pour permettre à l'ouvrier de prendre appui, et un tiroir situé en dessous lui permet de ranger les pièces en cours de réalisation. Le sol de l'atelier est recouvert d'un parquet à caillebotis afin d'éviter que les débris précieux n'adhèrent aux chaussures des ouvriers. De la même façon, l'évier où l'ouvrier se lave les mains est muni d'un filtre fin. Le contrôle du travail est très strict et lors du nettoyage de l'atelier, tous les déchets sont récupérés et réutilisés. On va même jusqu’à couper et brûler les pieds des tabourets en bois dans lesquels des résidus d’or se sont incrustés.

Représentation d’un établi d’orfèvre Représentation d’un établi d’orfèvre Représentation d’un établi d’orfèvre Gravure d’après l’Encyclopédie…, Diderot et d’Alembert, 1751-1780, vol.7, pl. VIII, Orfèvre Bijoutier. Fiche de ce document  
Reconstitution d’un établi d’orfèvre Reconstitution d’un établi d’orfèvre Reconstitution d’un établi d’orfèvre Reconstitution d’un établi d’orfèvre d’après le mobilier de l’atelier Lorrain, Niort, musée Bernard d’Agesci. Fiche de ce document  

Les outils destinés à la soudure, au sertissage, au découpage et à l'ébarbage des pièces, les outils utilisés pour graver et polir (étau, chalumeau, gouges, fers à graver, marteaux, ciselets…) ainsi que des boules en verre remplies de solution bleutée permettant de filtrer la lumière sur le bijou, sont disposés sur l'établi.

L’atelier comporte également les machines propres à préparer et traiter le métal.

Banc à étirer Banc à étirer Banc à étirer Banc à étirer issu de l’atelier Lorrain, 2e moitié du XIXe siècle, Niort, musée Bernard d’Agesci. Fiche de ce document  

Le banc à étirer, ou banc d'orfèvre, muni de filières, sert à étirer l'or et l'argent en fil. Présent dans tous les ateliers importants, il permet d'évaluer l'importance de la production du maître orfèvre.

Laminoir Laminoir Laminoir Laminoir issu de l’atelier Lorrain, 2e moitié du XIXe siècle, Niort, musée Bernard d’Agesci. Fiche de ce document  

Un laminoir permet d'affiner progressivement, en plusieurs passes à l'aide d'une manivelle, un lingot de métal entre deux cylindres d'acier, cannelés ou lisses, qui tournent en sens inverse, afin de le transformer en feuille.

Presse Presse Presse Presse issue de l’atelier Lorrain, 2e moitié du XIXe siècle, Niort, musée Bernard d’Agesci. Fiche de ce document  

Une presse à balancier où sont fixées les matrices en acier destinées à imprimer une plaque de métal permet, quant à elle, l'estampage des bijoux.

La forge, élément essentiel de l'atelier, est utilisée pour la fonte des matériaux dans des creusets afin d'obtenir des lingots d'alliage homogène. Le foyer est attisé par des soufflets en cuir.

L'orfèvre bijoutier dispose d'un nombre important d'outils très souvent fabriqués par ses soins et dont les séries sont parfois nombreuses dans une même typologie. La précision de ces outils et l'habileté à les manier influencent le résultat final. Ils sont généralement classés en fonction de leur taille et de leur usage dans des layettes, meubles à tiroirs compartimentés, des râteliers, dispositifs aménagés à côté de l'établi, ou sur de simples étagères.

Parmi ces outils, les outils de mise en forme (creusets, marteaux à tête plate, dés à emboutir, maillets à dresser, cisailles, mandrins, bigornes, bouterolles, limes, pinces à étirer, résingles, étaux, presses, filières, moules, matrices) se distinguent des outils d’assemblage, de finition et de décor (poinçons, brunissoirs, échoppes).

Outils de l’orfèvre bijoutier Outils de l’orfèvre bijoutier Outils de l’orfèvre bijoutier Gravure d’après l’Encyclopédie…, Diderot et d’Alembert, 1751-1780, vol.7, pl. V, Orfèvre Bijoutier, Outils. Fiche de ce document