Les panneaux de La Mothe-Saint-Héray

Détail du panneau A3 figurant Dieu désignant à Adam l'arbre de la connaissance

Illustrations

Panneau E4 : la coupe dans le sac de Benjamin Détail du panneau B15 : paysage avec pont

La question de la « création » chez les peintres ambulants

Si la découverte des sources iconographiques n'a pu apporter de certitude ni sur l'auteur de la commande, ni sur la datation de l'œuvre, ni sur l'identité du peintre, elle aura du moins permis de situer ces panneaux historiés dans le grand courant d'influence de la gravure flamande à la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe courant mis en évidence ces dernières années par de nombreuses recherches 27(Note 27. Parmi les études les plus récentes, voir B. Jestaz, « L'influence flamande en France à la fin du XVIe siècle », Actes du colloque international sur l'art de Fontainebleau, op. cit., pp. 75-83.) . À La Mothe-Saint-Héray, le cas est d'autant plus intéressant qu'il rassemble les deux phénomènes : déplacement des estampes et voyage des peintres. Il n'est pas exclu, d'ailleurs, comme on l'a déjà dit, que ce peintre flamand ait emporté avec lui les gravures de Peter Van der Borcht. De plus, ces exemples, fréquents dans l'orfèvrerie, les émaux et les arts décoratifs en général, sont relativement rares en ce qui concerne la peinture : les cas du Lude et de Villeneuve-Lembron évoqués plus haut sont bien antérieurs et surtout, ils mettent en jeu les gravures de Bernard Salomon et non des gravures flamandes.

La connaissance des sources sert aussi à comprendre comment a travaillé le peintre, dont on a pu suivre la démarche, découvrir les hésitations, les procédés, les tentatives de création et les limites. Il est plus fréquent de pouvoir mener cette analyse sur de grands maîtres que sur des artistes plus modestes. Pour ceux-ci, en particulier pour les peintres ambulants, le problème de la création se pose de façon différente : on a pu se rendre compte ici de la nécessité pour eux d'avoir recours à des modèles, et à quel point ces modèles passaient par les gravures.

Il serait sans doute intéressant de pouvoir mettre un nom sur ces panneaux historiés, mais outre le caractère hasardeux des recherches que cela exigerait, il n'est pas certain que la connaissance que nous en avons s'en trouverait accrue, car leur auteur est probablement un peintre par ailleurs inconnu.

Le choix de ce type de peintre reflète en tous cas certaines des tendances de l'époque. Il peut témoigner du goût des seigneurs de La Mothe-Saint-Héray pour la peinture flamande, mais il montre à coup sûr que les peintres originaires des Pays-Bas s'étaient imposés en France autant par leur présence massive que par leur savoir-faire, non seulement dans les hautes sphères des grands maîtres de la seconde École de Fontainebleau, mais aussi dans les provinces, et parmi les peintres ambulants, à la créativité plus limitée 28(Note 28. En ce qui concerne les peintures murales du château du Lude, on notera que J. Ehrmann proposait qu'elles eussent été l'œuvre de plusieurs peintres flamands dans « Artistes franco-flamands de l'École de Fontainebleau... », Bulletin de la Société d'histoire de l'art français, 1972, pp. 63-77. Dans notre région elle-même, il y aurait probablement d'autres exemples, dont celui du cycle de la vie et de la passion du Christ peint sur petits panneaux du cabinet des peintures (dit aussi « salle de bain ») au château de la Roche-Courbon (Charente-Maritime), Ces panneaux, sans doute un peu plus tardifs que ceux de La Mothe-Saint-Héray, et d'un style différent, laissent en tout cas supposer, dans leur apparence immédiate, une main flamande.).


NOTES

27. Parmi les études les plus récentes, voir B. Jestaz, « L'influence flamande en France à la fin du XVIe siècle », Actes du colloque international sur l'art de Fontainebleau, op. cit., pp. 75-83.

28. En ce qui concerne les peintures murales du château du Lude, on notera que J. Ehrmann proposait qu'elles eussent été l'œuvre de plusieurs peintres flamands dans « Artistes franco-flamands de l'École de Fontainebleau... », Bulletin de la Société d'histoire de l'art français, 1972, pp. 63-77. Dans notre région elle-même, il y aurait probablement d'autres exemples, dont celui du cycle de la vie et de la passion du Christ peint sur petits panneaux du cabinet des peintures (dit aussi « salle de bain ») au château de la Roche-Courbon (Charente-Maritime), Ces panneaux, sans doute un peu plus tardifs que ceux de La Mothe-Saint-Héray, et d'un style différent, laissent en tout cas supposer, dans leur apparence immédiate, une main flamande.

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