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1914-1918

Ici et là-bas

1917 : l'année troublée

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L'année 1917 peut être qualifiée d'année troublée pour plusieurs raisons. Sur le front occidental, elle est marquée par la grande offensive de l'Aisne lancée contre les lignes allemandes le 16 avril par le général Nivelle. Cette offensive n'a pas tenu compte de la réorganisation des Allemands le long du Chemin des Dames, les plaçant alors en position de force. L'échec de cette offensive est terrible, il se solde le 4 mai 1917 par la mort de 30 000 soldats en 10 jours. Nivelle engage alors une seconde offensive, là encore c'est un échec : les combats sur le plateau de Craonne sont de véritables tueries. Le 15 mai, Philippe Pétain remplace Nivelle comme commandant en chef des armées françaises.

« J'ai reçu une carte [d'Adolphe] du 13 hier. Tu vois que ce n'est pas des nouvelles fraîches. Depuis il s'est passé bien des combats car il met sur sa carte qu'ils ne sont pas engagés encore dans la grande attaque de Reims mais attendent le grand coup. Tu vois d'après sa carte qu'il a bien dû faire partie de la bataille qui s'y passe depuis quelques jours. »
Héloïse, le 20 avril 1917

« Il s'est passé de grands combats. Il y en a beaucoup encore qui seront restés sur le terrain, malheureusement. Enfin, que veux-tu, c'est terrible de penser à des boucheries pareilles. […] Je crois bien qu'il y en a assez de détruit maintenant. Des choses pareilles ne devraient pas exister. »
Héloïse, le 25 avril 1917

« Ce soir je viens de recevoir une petite lettre d'Adolphe. Il me dit qu'il est dans la danse… »
Ernest à Héloïse, le 29 avril 1917

« J'ai reçu des nouvelles d'Adolphe hier matin, une lettre du 29, partie du secteur le 30 […]. Il me dit qu'ils sont toujours en ligne et qu'il ne sait pas le temps qu'ils y resteront. Ils ne sont pas très heureux car ils n'ont pas assez à manger. Tu penses bien que dans ces moments de bombardements, le ravitaillement ne peut pas se faire. Il me dit que le recul des boches se fait avec de la casse et beaucoup trop. »
Héloïse, le 4 mai 1917

« Tu me parles d'Adolphe. Il était encore en ligne quand il a écrit. Il s'est passé des coups durs mais il faut espérer qu'il soit relevé bientôt. »
Ernest, le 7 mai 191)

« Nous devons être relevés peut-être demain. […] on ne nous prendrait pas pour des soldats car l'on n'en a pas beaucoup la couleur : la chemise, la figure et les mains comme la cheminée. »
Adolphe, le 23 mai 1917

« Hier nous avions encore une attaque à 4 h 30 du soir. […] Près de Corbény, à l'Est de Craonne, nous avons fait 53 prisonniers. Mais le soir, à la nuit, dans ma section, dans un petit abri sous terre, nous avons trois morts et 2 blessés. Alors, sur 15 que nous étions, nous voilà plus que 10. Et tout cela par des maladroits de nos officiers qui avaient placé 300 grenades auprès de nous et qui les ont fait toutes exploser. Heureusement pour moi que j'étais de côté. J'ai tout simplement été commotionné. Mais depuis hier soir, on travaille pour les sortir. Ils ont au moins 5 mètres de terre sur eux. »
Adolphe, le 23 mai 1917

 

En Russie

Un climat de révolte gronde sur le front de l'Est: dès le mois de mars éclatent des mutineries parmi les soldats de l'armée russe. Le 15 mars le tsar Nicolas II abdique. La dynastie des Romanoff s'effondre. Lénine, chef du parti bolchevique et Trotsky souhaitent la paix pour instaurer en Russie un état communiste. Les 6 et 7 novembre 1917 a lieu la Révolution d'octobre. Le lendemain est mis en place le premier gouvernement communiste. La Russie finira par se retirer du conflit : le 17 décembre l'armistice est signé en attendant le traité de paix de mars 1918 avec les Empires centraux. Un accord passé en 1915 entre la France et le tsar prévoyait la présence de soldats russes en France en échange de caisses de munitions. Malgré le retrait de la Russie en 1917, ces soldats continueront à se battre aux côtés des Français.

« Le temps est long et la neige ne fond pas vite. L'on compte sur une forte attaque bientôt car hier, on a fait un prisonnier qui nous a dit que nous avions devant nous des troupes d'assaut venant du front russe ; il y a du vrai : les Russes ne sont plus en guerre, alors il faut compter être écrasé sous peu, dans un coin ou un autre. »
Adolphe, le 10 décembre 1917

Le climat de révolte russe se propage jusqu'en France. Éprouvés par les combats sur le plateau de Craonne, des soldats de l'armée française se mutinent. Les rapports officiels en font état à partir du 20 mai. À aucun moment la presse ne relate ces révoltes. Plus de la moitié des divisions de l'armée française sont touchées : mises au repos pour quelques jours, elles refusent de repartir au combat. 554 soldats auraient été jugés et condamnés à mort. 50 d'entre eux seront exécutés. Pétain, qui remplace Nivelle après le massacre du Chemin des Dames réussit finalement à endiguer les mutineries et tend à améliorer la condition du soldat.

« Je peux te dire que ça va mal parmi les soldats qui se révoltent pour tout de bon. Et si nous avons resté aussi longtemps dans ce secteur, c'est qu'il n'y avait personne pour nous relever ou du moins qu'ils ont refusé de marcher. Et ce régiment je peux te le citer : il est de Sens, le 82 de ligne du 5e corps et bien d'autres régiments encore que je ne veux pas te dire, surtout des chasseurs à pied. Il faut que la guerre finisse à tout prix, ou alors ce sera la révolution de tous les soldats des tranchées. Je ne parle pas des autres à l'arrière. Eux ils ignorent ce que l'on souffre ici. Discuter de la guerre avec un journal et assister aux attaques qui viennent de se dérouler, il y a cent pour cent de différence. »
Adolphe à sa sœur, le 5 juin 1917

« Ce pauvre Adolphe a écrit qu'il était rendu sur le plateau de Craonne en première ligne. Ils y sont montés le 24. Ils n'ont pas pu passer le 29 vu les tirs de barrage qu'il y avait. Il ne sait pas le temps qu'il restera en première ligne. »
Héloïse, le 20 juillet 1917

« J'ai reçu deux lettres d'Adolphe cette semaine. Il est rendu aux environs de Nancy. Ils sont au repos en attendant les renforts du régiment. »
Héloïse