AU-DELA DU NOIR
Retour sur une exposition

30 avril au 29 août 2010, musée Saintes-Croix, Poitiers

Sommaire

Entretien avec Jean-Pierre Potier (fin)


Tout en proposant des variations sur le même motif, votre série est composée d'une trentaine de dessins en majorité d'un même format (110 x 130 cm), il y a pourtant des exceptions 18 petits formats (38 x 38 cm), deux diptyques (Silo 17 et Silo 23) et un grand format (200 x 200 cm) sur fond rouge (silo 13). Pourquoi ces singularités ?

C'est en relation avec l'exposition. Au départ, j'ai travaillé sur ce thème sans projection, sans penser à une exposition particulière. Quand l'idée de cette exposition s’est dessinée, j'ai décidé d'utiliser un format presque carré (110 x 130 cm) correspondant à la nature de ce travail. J'ai aussi voulu créer des ruptures de rythme dans l'exposition, de manière à éviter la monotonie – tant pour celui qui regarde que pour moi – du même sujet porté sur des supports de même dimension. Donc, j'ai souhaité créer une série de 18 petits dessins qui, ensemble, forment un grand format, une accumulation de silos de modèles tous différents, non pas pour en dresser un catalogue mais pour produire une « richesse », une impression d’abondance.
C'est une pièce que j'ai finalement séparée en installant l'exposition, afin de créer une meilleure respiration entre les différents formats. Quatre éléments sont présentés à la fin de l'exposition tandis que les quatorze autres sont présentés sur deux lignes dans la première salle.


Ensemble de 18 dessins fusain, pierre noire et acrylique sur drop paper monté sur chassis bois 38 cm x 38 cm

Vous pouvez zoomer sur l'image ci-contre pour voir les différents dessins en détail.
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Les deux diptyques sont là encore des variations de format, ils s'inscrivent dans cet ensemble, de travail qui est aussi un laboratoire. J'avais envie de travailler sur de plus grands formats, je n'avais jamais fait de diptyque et je souhaitais voir comment cela pouvait fonctionner  et finalement cette association de deux formats me semble intéressante.


 

 

Quant au « grand rouge », j'avais décidé de faire une grande toile pour l'exposition. Je voulais introduire cette couleur, car le rouge fonctionne bien avec le noir et j'ai du mal à ne pas l’employer. C’est vraiment ma couleur : elle apparaît dans toutes mes toiles et là comme j'avais pris le parti de faire quelque chose d'assez austère... j'ai décidé de faire UNE toile rouge. Cela me permet d'augmenter le côté monumental, de mettre en scène une sorte d'amalgame de silos en le théâtralisant. J’y ai associé des silos de zones portuaires à des silos de campagne ; des architectures en métal, d’autres en bois. On rencontre parfois de  vieux silos sur lesquels on a greffé des structures plus récentes... Pour en revenir à ma couleur préférée,  j'avais besoin d'une tache rouge dans cette exposition, pour aller au-delà du noir, une projection pour aller plus loin. 


Pour en revenir sur l'accrochage de cette exposition, quels ont été vos choix et vos contraintes ?

La contrainte était surtout la hauteur de plafond relativement basse qui correspond à la hauteur de mon atelier. De fait, j'avais un peu une idée de ce que cela pouvait donner sans pouvoir les aligner. La mise en scène de l'exposition a donc consisté à réussir à faire vivre ensemble les dessins de cette série. Il ne fallait pas qu'ils luttent les uns contre les autres. J'avais réalisé un plan-maquette de l'installation mais j'ai tout de même modifié quelques éléments comme la disposition du « grand rouge » que j'ai finalement isolé sur un pan de mur en fin d'exposition pour lui donner plus d'espace. J'ai, comme évoqué plus haut, dissocié l'ensemble des 18 petits formats.

 

Pour les autres, j'ai procédé à des regroupements par matériaux, par formes, par orientation. Ces regroupements forment de petites unités entrecoupées de zones de respiration. Au final, la salle d'exposition se prêtait bien à ce travail avec de grands linéaires, des ruptures et des boxes qui me permettaient d'isoler quelques pièces comme le diptyque ou les deux dessins parmi les plus anciens qui sont dans « l'apparition-disparition », moins définis.

Enfin, le choix d'utiliser des caisses américaines à bords noirs et fond blanc tournant à l'intérieur permet de retrouver le blanc des murs et le noir du plafond qui renforcent la bonne intégration dans l’espace.


L'exposition temporaire de Poitiers présente la grande majorité de votre série sur les silos depuis les premiers dessins et se clôture sur le « grand rouge » et vous avez continué...

Pour cette exposition, j'aurais souhaité produire des volumes, des pièces en trois dimensions. Cela n'a pu se faire faute de temps. Cela reste une perspective de travail. D’autre part, j'avais l'envie de réintroduire de la couleur, ce que je m'étais refusé pour l'exposition car je voulais conserver une certaine austérité. Je voulais tout de même essayer et j'ai procédé par des petites touches de couleur qui viennent allumer, réchauffer ces bâtiments. J'ai donc commencé une série où j'utilise la couleur mais à dose « homéopathique ».

… de plus sur cette série, ce qui frappe, c'est le changement d'échelle et la mise à distance du silo...

J'ai voulu inverser l'image que j'avais donnée du silo. Dans la série présentée à Poitiers, le motif s'impose dans sa monumentalité ;  le paysage et la présence humaine ne figurent pratiquement pas dans le dessin, nous sommes au pied du silo. Dans la nouvelle série c’est un basculement, le silo apparaît  dans le lointain se découpant sur la ligne d’horizon dans un grand paysage de plaine déserte.