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Retrouver l'auteur du portrait

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Le tableau conservé au musée Sainte-Croix n'est pas signé. En l'absence de registres paroissiaux de l'Ancien Régime à Paris, on ne peut que présenter une hypothèse plausible pour identifier l'auteur de ce portrait, et souligner les liens qui existaient entre Gilles Isaac, le tenancier de l'hôtel, et Louis Levasseur, peintre peu connu, établi dans la même paroisse Saint-Sulpice. L'exploration des actes notariés fournit un certain nombre d'indices.

La famille Isaac

Le testament de Gabrielle Isaac, veuve de Jean Girard, daté de 1650, cite parmi les légataires une Marguerite Isaac, sa soeur.
Marguerite Isaac morte à l'hôtel de France en 1740 ne peut être la même Marguerite. Cependant, dans son testament rédigé en 1738, sont mentionnées Marie et Catherine Girard, « cousines issues de germain ». Ceci tend à prouver que Marguerite Isaac, morte en 1740, descend de la même famille que Gabrielle, veuve de Jean Girard en 1650.
Il n'y a aucun lien manifeste entre cette famille Isaac et celle du graveur en taille-douce Gaspar Isaac, d'origine flamande, installé à Paris et dont la descendance et les alliances prestigieuses peuvent être reconstituées.

<p>Arbre généalogique de la famille Isaac d'après les recherches de Danielle Velde.</p>

Arbre généalogique de la famille Isaac d'après les recherches de Danielle Velde.

Les Levasseur

Lors de son décès en 1740, Marguerite Isaac loue à l'hôtel de France un logis à son beau-frère, Nicolas Levasseur, veuf de Marie Isaac. On peut supposer que Nicolas Levasseur était le gendre de Gilles Isaac, ayant épousé sa fille Marie ; il lui aurait succédé comme tenancier de l'hôtel.
Un certain nombre d'artisans portant le patronyme de Levasseur habitent, à cette époque, dans la paroisse Saint-Sulpice. Parmi eux, Louis Levasseur, maître peintre, demeurant rue des Canettes à sa mort en 1737. Les scellés mentionnent parmi bien d'autres outils, couleurs et produits nécessaires à l'art de peindre, « huit tableaux peints sur toile de différentes grandeurs tous en bordures de bois sculpté doré deux sont personnages de famille le troisième est un christ, le quatrième est une Sainte Vierge le cinquième et le sixième sont des fruits ainsi que le septième et dernier un divertissement de village un cartouche au chiffre peint sur toile en bordure de bois mouluré et doré un autre tableau assez grand sur la cheminée représentant des fleurs en bordure de bois sculpté et doré ».
En somme, Louis Levasseur, qui n'est pas répertorié parmi les peintres de cette époque, semble avoir touché à tous les genres. Il était peut-être aussi sculpteur : en avril 1715, un contrat d'apprentissage lie un Louis Levasseur, cité comme peintre et sculpteur, à Louis Augustin Hue.
À la fin de sa vie en 1733, Louis Levasseur et son épouse, Louise Gaujard, assistent au mariage d'une nièce de Louis, Louise Levasseur, avec un doreur, Jean Baptiste Lagüe. Louise Levasseur reçoit alors une dot importante. Elle était la fille de Jacques Levasseur, maître peintre décédé, frère de Louis. Référence est faite à des actes notariés par lesquels trois frères, Louis, Jacques et Michel, ont reçu des rentes en héritage de leur oncle Christophe Levasseur devant notaire, à Ollainville.
Enfin, Louis est parent de Louis Antoine Levasseur, maître tapissier, artisan très actif dans ce même quartier de Paris et décédé après 1751 ; les scellés nous apprennent qu'au moment de la mort de Louis, un objet (un panillon de serge bleue) appartenant à Louis Antoine était présent dans le logis de la rue des Canettes. On peut donc supposer l'existence de liens familiaux entre Louis et Louis Antoine, supposition étayée par la mention du même Louis Antoine dans le testament de Louise Gaujard, épouse du peintre Louis Levasseur, daté d'août 1738, qui fait de Louis Antoine son exécuteur testamentaire.
Dans la famille de Louise Gaujard, on compte aussi un peintre, Louis Gaujard. Et lors du mariage de Louis Antoine en 1718, ce dernier a parmi ses témoins encore un peintre, Claude Delaforge.