Les mesures d’uniformisation ont été imposées plus tardivement en province qu’à Paris, essentiellement après la Révolution française.
Les poinçons de maîtres y sont donc plus variés car les règles, plus souples, y sont fixées par l’autorité locale.
Jusqu’au XVIe siècle, il s’agit d’un symbole ou de la devise de l’orfèvre, parfois accompagné de ses initiales ou de son nom. Ainsi les orfèvres strasbourgeois avaient pour règle d’inscrire leur nom en toutes lettres dans leur poinçon, de même que ceux de la région de Toulouse, Béziers ou Perpignan.
On trouve également parfois mention de la ville de l'orfèvre inscrite en toute lettre, comme sur le poinçon d'Adolphe-Charles Solinger (ci-contre).
Les initiales ne seront imposées aux orfèvres de province qu’en 1672, bien après Paris, toujours dans le souci d’éviter les confusions.
Les initiales ou le nom de l'orfèvre sont souvent agrémentés d'un symbole. La fleur de lys est beaucoup moins répandue en province et remplacée par d'autres motifs : il peut s'agir d'un animal, d'une fleur ou d'un outil. Ce symbole a généralement trait aux origines de l'orfèvre ; il représente souvent l'emblème de sa ville (une clef à Angers, un bateau à Rouen ou à Dieppe, etc.) ou le symbole de sa région (l'hermine en Bretagne).
Ces initiales ou ce symbole sont généralement placés dans une forme géométrique : un losange comme à Paris, horizontal ou vertical, un ovale ou un rectangle ; le losange sera finalement imposé aux orfèvres de tout le pays à partir de 1797, bien plus tardivement qu’à Paris.
Le poinçon du maître orfèvre peut évoluer au fil du temps. Il n’est ainsi pas rare de trouver plusieurs poinçons différents pour un même orfèvre, marquant différentes périodes de sa carrière. Les éléments qui le composent peuvent ainsi varier dans le temps : le losange qui l’entoure peut changer d’orientation. De même, le symbole caractérisant le poinçon peut changer de sens ou de physionomie et le nombre de grains de remède peut évoluer.
Certains orfèvres ont également fondé de véritables dynasties. Le poinçon peut alors être repris ou bien changé par ses descendants, mais dans ce dernier cas, il présente presque toujours des similitudes de forme ou de symbole.
L’examen attentif du poinçon de maître, par recoupement avec les autres poinçons présents sur l’objet, peut ainsi fournir nombre de précieux renseignements sur l’objet, comme l'identité de l’orfèvre qui l’a réalisé. Il permet également de définir la datation de l’objet grâce aux éventuelles variations qu’il a pu subir dans le temps.
Malheureusement, ces poinçons de maîtres orfèvres ont eu tendance à disparaître depuis la Révolution, par la réunion des orfèvres en guilde. Par ailleurs, du fait que le poinçon de maître soit le premier insculpé sur la pièce à peine ébauchée, et retravaillée ensuite, il est souvent le moins lisible des poinçons apposés sur la pièce d’orfèvrerie.
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