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La faïence
Terre cuite émaillée

Les origines de la faïence

La faïence est une terre cuite argileuse recouverte d’un émail opaque à base d’étain qui la rend imperméable. Elle doit son nom à Faenza, ville italienne qui fut au XVe siècle le centre de production et de diffusion de céramique renommée dans toute l’Europe.

La faïence serait apparue au Moyen-Orient en Assyrie. En effet l’analyse des célèbres revêtements muraux des palais aujourd’hui conservés en partie au musée du Louvre révèle des sels d’étain.
L’art de la faïence se diffusa sur le pourtour sud du bassin méditerranéen en Syrie, Égypte et en Afrique du nord.

Les maures introduisent cette technique en Espagne où l’on fabrique dès le XIIIe siècle les fameuses faïences hispano-mauresques à lustre métallique (à base de sels de cuivre, d’argent, d’or) de Valence, Malaga et Manisès. Elles sont importées en Italie sur des bateaux majorquais, d’où leur nom « majolique ».
En France le mot de majolique désigne la production italienne du XVe et XVIe siècles et les premières productions françaises.

Les grands centres de production de faïence

Faïences hispano-mauresques et majoliques italiennes sont à l’origine de toutes les faïences européennes par l’intermédiaire de Delft, de Nevers et Rouen.

Delft

À Delft se conjuguent les influences orientales avec l’importation de porcelaines de Chine et du Japon par les compagnies des Indes.

Nevers

L’origine des faïences de Nevers remonte aux trois frères italiens Conrado ; ils obtinrent d’Henri IV en 1603 un privilège pour trente ans. La faïence de Nevers reste plus imprégné du style italien mais dès 1640 apparaissent des motifs orientalisants et des inventions comme le décor à la palette qui donne à Nevers sa réputation européenne.
Au cours du XVIIIe siècle, le décor prend un aspect plus familier avec les faïences patronymiques puis les faïences révolutionnaires.

Rouen

Rouen connaît une première production au XVIe siècle avec l’atelier de l’italien Masseo Abaquesne et prend son essor à partir de 1644 avec les Poterat influencés par Nevers et Delft.

Au XVIIIe siècle

Au XVIIIe siècle, partout on cherche à produire des faïences. Les grands centres sont copiés. Nevers et Rouen servent de modèle à : Paris, Saint-Cloud, Saint-Omer, Moulins, Sinceny, Saint-Amand, Rennes, Quimper, Saintes, La Rochelle. Dans le Sud, les centres de Marseille et Moustier sont imités à Montpellier, Samadet, Lyon, Toulouse et Bordeaux. Les faïenceries de Marans, active de 1745 à 1746, ou de Rigné à Thouars à la fin du 18e siècle restent plus anecdotiques et passagères en Poitou-Charentes.

Les différentes sortes de faïences

On distingue les faïences de grand feu, les faïences de petit feu et les faïences fines.
La distinction entre faïence de grand feu et de petit feu n’est qu’un procédé de décor et non de fabrication : les faïences de grand feu sont décorées sur émail cru, les faïences de petit feu sont décorées sur émail cuit.
La différence entre les faïences de petit et de grand feu et la faïence fine est de fabrication : pâte et couverte.

Les faïences de grand feu

Les faïences proprement dites sont « de grand feu ». Après la cuisson de dégourdi, elles sont entièrement recouvertes ou plongées dans un émail stannifère.
Elles reçoivent ensuite un décor coloré. L’opération est très délicate car la terre est encore poreuse et boit les oxydes colorants. Jusqu'au XVIIIe siècle, les oxydes métalliques connus pour donner les couleurs sont peu nombreux. On a donc que le bleu de cobalt, le vert et le rouge de cuivre, le brun violacé de manganèse, les brun, jaune et rouge de fer. Le bleu de cobalt est la couleur la plus employée car c’est celle qui supporte le mieux la cuisson à haute température.
À partir du XIXe siècle, la palette se nuance avec les couleurs obtenues avec du chrome. On arrive ainsi à avoir plusieurs nuances de rouge, bleu, vert, jaune.

Les faïences de petit feu

Les faïences de petit feu reçoivent un décor sur émail cuit. Le décor peint est beaucoup plus facile à poser, la terre n’étant plus poreuse. Ses couleurs sont plus riches et nuancées que dans la faïence de grand feu car elles peuvent être cuites à plus basse température. Le rose, l’or, le vert pâle apparaissent alors.

Apparues à la fin du XVIIe siècle, les faïences de petit feu connaîtront un grand développement en France au XVIIIe siècle dans les grands centres de Strasbourg, Niederviller, Marseille, Sceaux, Rouen, Moustier, mais également dans le nord à Lille, Saint-Amand-les-Eaux, Saint-Omer, Sinceny, Paris, Saint-Cloud ; dans l’est à Aprey, Luneville, Saint-Clément, Les Islettes ; dans le centre à Moulins, Clermont-Ferrand ; dans l’ouest à Quimper, Rennes, Le Croisic, Angoulême, La Rochelle, Cognac, Saintes et dans le midi à Meillonas, Montpellier, Bordeaux, Samadet, Varages.

La faïence fine

La faïence fine est une tentative des céramistes anglais pour se rapprocher le plus possible de l’aspect de la porcelaine. C’est une céramique à pâte fine blanche opaque, dense, sonore qui ne nécessite pas d’être cachée. Elle n’est donc pas émaillée mais couverte après cuisson d’un vernis plombifère transparent. La pâte étant très plastique et se façonnant bien, on obtient des décors en relief d’une grande précision. Quand l’argile comporte de la chaux, on parle de "terre de pipe", si non on parle de "cailloutée".

La faïence fine a été fabriquée à partir de 1743 en région parisienne dans les centres du Pont au Choux, de Sèvres, Val de Meudon, dans l’est, à Lunéville (où l’on distingue la production de l’artiste Cifflé), Saint-Clément, Toul, Sarreguemines, dans le midi à Apt, Castellet, Toulouse.

Les fabriques de Montereau, Creil, Douai, Chantilly, Forges-les-Eaux sont d’origine anglaise.

Le décor des faïences

Chaque manufacture a son style qui fait son renom : la fleur de Strasbourg, le trompe-l’œil de Niederviller, les bouquets de Sceaux, le décor à la Berain de Moustier, le fond jaune de Marseille et Montpellier. Les formes sont inspirées de la vaisselle d’argenterie que les grandes fontes imposées par Louis XIV en 1689 et 1709 avaient fait disparaître en partie. Les décors sont empruntés aux autres arts : peinture, gravure, reliure, sculpture, orfèvrerie, dentelle, ferronnerie… .

La découverte en Angleterre au XVIIIe siècle du procédé de l’impression pour le décor facilita beaucoup les choses. D’abord monochrome, l’impression put être réalisée en polychromie grâce au procédé de la chromolithographie. On put ainsi obtenir jusqu’à 18 tons et des dégradés. Le procédé de la décalcomanie rendit la tâche en encore plus facile. Aujourd’hui le décor peut être obtenu avec l’aide des techniques informatiques (tout comme la fabrication qui peut être programmée).