ageroman.org : parcours en Deux-Sèvres

accès direct au sommaire

Introduction

Le département des Deux-Sèvres, dessiné lors de la Révolution française, appartient historiquement à l'ancien comté de Poitou. Touchant au nord l'Anjou et au sud la Saintonge, ce territoire conserve nombre de monuments civils, militaires et religieux significatifs de l'art roman en Poitou.

Nous verrons :

Nous aurions souhaité vous présenter Sauzais-Vaussais dont la modeste église adopte un chevet plat. Elle est fermée au public en raison de son état.

Niort

Commençons notre visite par le chef-lieu du département : Niort et son donjon qui abrite un musée.

L'ensemble devant vous est composé de deux tours carrées, reliées entre elles par un bâtiment central. Ces deux tours sont flanquées, aux angles de contreforts cylindriques caractéristiques de l'architecture défensive de la fin du XIIe siècle. Il s'agit d'un exemple rare de double donjon.

Le donjon de Niort a été construit à la fin du XIIe siècle pour protéger le port, centre commercial important d'où s'exportait le vin en Angleterre et en Flandres. Il est un des premiers châteaux français à présenter des archères et à être doté de mâchicoulis sur arcs, systèmes défensifs rapportés du Proche-Orient après les croisades.

On pénétrait par une porte située sur la face donnant sur la ville, à l'opposé de la Sèvre Niortaise. Surélevée, la porte n'était accessible que par une échelle, vite enlevée en cas d'attaque. Aujourd'hui, on entre par une porte aménagée plus tard, à droite de la première. Il faut admirer les gros quartiers de pierre soigneusement taillés et maçonnés.

Ils sont gravés de signes, marques indiquant le sens de pose de la pierre ou marques comptables pour permettre au maître de chantier de rétribuer le travail effectué. Ou pourquoi pas « signature » du tailleur de pierre fier de son travail ?

Ce donjon doit toute sa beauté à l'art des bâtisseurs (tailleurs de pierre et maçons) et à ses volumes qui lui donnent monumentalité et puissance.

L'aménagement intérieur, dont les cheminées sont le seul ornement, a été réalisé plus tard.

Champdeniers

Notre-Dame de Champdeniers, église prieurale dépendant de Maillezais, a été construite dans les années 1070-1090 à flanc de coteau. Une série de marches conduit au portail occidental encadré de deux arcatures aveugles, le tout d'une grande sobriété et protégé par un porche. La nef à collatéraux est caractéristique du plan adopté par les grands édifices poitevins au XIe siècle tels Saint-Jean-de-Montierneuf à Poitiers ou l'abbatiale de Saint-Savin-sur-Gartempe. Elle reçoit une voûte en berceau plein-cintre, renforcée d'arcs-doubleaux et épaulée par les voûtes d'arêtes des collatéraux. Les chapiteaux des colonnes sont le domaine de la sculpture. Toutes les inventions des édifices du XIe siècle y sont reprises : chapiteaux corinthiens, chapiteaux à corbeilles lisses partiellement sculptés de motifs de vannerie, chapiteaux décorés de lourdes ramifications végétales à feuilles grasses, chapiteaux aux lions affrontés, aux masques, aux animaux fantastiques issus des recueils de bestiaire. Vous pourrez les comparer avec les chapiteaux conservés au musée de Poitiers.

Les chapiteaux historiés sont rares : on notera cependant une scène qui pourrait être de réconciliation et une autre suggérant une arrestation. On y retrouve la même verve populaire que dans le célèbre chapiteau de la Dispute du musée de Poitiers.

Dans la voûte du bras du transept sont insérés des pots acoustiques.

Sous le chœur, reconstruit à l'époque gothique, la crypte possède de beaux chapiteaux décorés de vannerie et de palmettes.

Notre-Dame de Champdeniers conserve l'un des plus beaux ensembles sculptés illustrant l'Âge roman en Poitou à la fin du XIe siècle.

Argenton-Château

Les études récentes menées sur les petites villes du Haut-Poitou de l'Antiquité au Moyen Âge tendent à prouver qu'elles se sont développées à l'intérieur de l'enceinte d'un castrum. C'est le cas d'Argenton-Château (aujourd'hui commune d'Argenton-les-Vallées) situé sur un promontoire à la confluence de l'Ouère et de l'Argenton.

La chapelle castrale Saint-Georges

La chapelle castrale Saint-Georges, bien que restaurée à la fin du XVe siècle quand Philippe de Commines, le rédacteur des mémoires des règnes de Louis XI et Charles VIII, était seigneur du lieu a gardé son chœur roman. La voûte de l'abside a reçu une peinture murale à fresque représentant un Christ en gloire accompagné, de part et d'autre, par les symboles des quatre évangélistes : l'ange de Matthieu, le lion de Marc, l'aigle de Jean et le taureau de Luc.

Peu connue du grand public, cette fresque monumentale mérite que l'on y prête attention. Dans une mandorle, le Christ, assis sur un trône circulaire, fait de sa main droite le geste de la bénédiction et tient dans sa main gauche un livre. Il est vêtu d'une tunique verte et d'un large manteau rouge. Sous les drapés, on devine aisément les volumes du corps soulignés par des plis emboîtés en V. Les détails sont soignés. Il faut remarquer la finesse et l'élégance des doigts. Sur le livre, on distingue encore l'alpha « ɑ » et l'oméga « ω » première et dernière lettres de l'alphabet grec, symboles de l'éternité du Christ. Le fond de la mandorle, à l'origine bleu (on en voit des traces intenses sous la manche droite du manteau rouge du Christ), était parsemé de quatre feuilles ; les pieds nus du Christ reposent sur un tapis (oriental ?) fleuri.

Notez la composition pyramidale des volumes s'amenuisant jusqu'à la figure du Christ. Cela engendre une disproportion entre le tronc et le visage très allongés et le reste du corps, accentuant l'effet monumental de la composition.

Les symboles des évangélistes, pleins de fougue, semblent flotter sur les bandes rouges, bleues et vertes qui ornent le fond de la fresque.

La datation de l'œuvre est incertaine, entre le milieu du XIIe siècle et le début du XIIIe siècle. Cependant, le style des inscriptions, des rapprochements avec un émail du musée de Cluny et, surtout, des similitudes avec le grand vitrail de la Crucifixion de la cathédrale de Poitiers, daté très précisément par la présence de ses donateurs, pourraient permettre de l'attribuer aux années 1160-1170.

Remarquez le faux appareillage peint qui date de la même époque.

L’église Saint-Gilles

L'église paroissiale Saint-Gilles a subi de nombreux remaniements au cours des siècles mais a gardé son portail roman. Ce portail est très intéressant par la façon dont il a été construit, son programme iconographique et la qualité de ses sculptures qui annoncent le gothique.

La pierre que l'on trouve aux alentours d'Argenton–Château, situé aux confins du Massif armoricain, est le granit qui a servi à la construction de l'édifice. Pour le décor sculpté, les artistes ont recherché une pierre plus tendre et blanche, le tuffeau provenant de carrières proches localisées par le laboratoire des Monuments historiques en Saumurois, en Thouarsais et à Oiron. La blancheur du tuffeau contraste avec le reste de la construction et illumine le portail qui présente un programme iconographique ambitieux.

Les chapiteaux décorés de feuilles d'acanthe supportent cinq voussures sculptées. La première reçoit des anges glorifiant l'agneau ; la deuxième nous montre le combat des vices et des vertus ; au-dessus, les vierges sages avec leurs lampes et les vierges folles les mains vides prennent place de part et d'autre du Christ tandis que, plus haut, ce sont les apôtres qui accompagnent le Christ ; sur la dernière voussure, les travaux des mois alternent avec les signes du zodiaque. Des inscriptions complètent les scènes. Ce portail s'apparente au type saintongeais tels Aulnay, Fenioux, Chadenac... à Argenton-Château, il est complété par une frise où figurent le Paradis avec la parabole du pauvre Lazare et l'Enfer avec les damnés se précipitant dans la gueule ouverte du Léviathan.

On est devant un message fort, celui du Jugement dernier. La qualité des sculptures est remarquable. Les figures se détachent du cadre presque en ronde-bosse. Elles sont pleines de vie, tournent la tête, croisent leurs jambes. Le modelé des corps se devine sous les étoffes finement ciselées.

Saint-Généroux

L'église de Saint-Généroux est sans doute l'une des plus anciennes du département. Elle est d'un grand intérêt, car sa construction, ses volumes, son décor présentent des solutions carolingiennes et, en même temps, adoptent des nouveautés romanes. Il est difficile pour les historiens de la dater avec précision d'autant qu'elle a subi des restaurations importantes en 1847 et en 1881. Jusqu'au début du XXe siècle, la tendance était de l'attribuer à la période carolingienne (IXe ou Xe siècle) ; aujourd'hui, il semble plus pertinent de la rapprocher du XIe siècle.

L'extérieur laisse deviner le plan du chevet, un chœur auquel se juxtaposent deux absidioles un peu plus courtes. C'est une solution carolingienne que l'on retrouve à Germigny-des-Prés. En revanche, l'appareil décoratif « à plat » de triangles alternant avec des cordons de billettes est un parti pris largement adopté dans la région à l'époque romane. On le retrouve à Notre-Dame-la-Grande de Poitiers.

à ce chœur est juxtaposé le volume de la nef. Rien ne permet de déceler transept ou collatéral. Et pourtant, quand on entre dans l'édifice, on est frappé par tous les cloisonnements. La nef charpentée a été divisée en trois vaisseaux par des arcades portées par des piles carrées. Le chœur voûté est séparé de la nef par un mur à trois arcades surmontées d'une claire-voie créant ainsi une vaste salle transversale assimilable à un transept. L'abside et les absidioles sont précédées de deux courtes travées et reliées entre elles par des baies géminées et des passages latéraux. Ce cloisonnement est un héritage du haut Moyen Âge permettant à l'édifice d'être très éclairé. On a donc les prémices d'un plan d'église romane caractéristique de la région.

Saint-Jouin-de-Marnes

L'abbaye de Saint-Jouin-de-Marnes a été fondée au IVe siècle par l'ermite Jovinus. Le lieu s'appelait Ension et devint Saint-Jouin-de-Marnes au Xe siècle en souvenir du fondateur de l'abbaye. C'est une des plus anciennes et des plus grandes abbayes du Poitou. C'est également l'une des constructions les plus abouties. Bâtie aux XIe et XIIe siècles, l'église se compose d'une nef à collatéraux longue de dix travées, d'un transept et d'un chœur à déambulatoire et chapelles rayonnantes. Ce plan est caractéristique des édifices romans de la région où les architectes résolvent le problème de la stabilité de l'édifice en épaulant la voûte centrale de la nef par les voûtes des collatéraux.

Le chœur et une grande partie de la nef ont reçu des voûtes gothiques au XIIIe siècle. L'édifice a subi des restaurations conséquentes à la fin du XIXe et au début du XXe siècle

C'est l'extérieur de l'édifice qui retiendra notre attention.

Juché sur un promontoire, le chevet présente une superposition impressionnante des volumes. Les arcs-boutants, les chapelles rayonnantes, le déambulatoire avec sa couronne de modillons sculptés et l'abside sont dominés par le clocher carré à deux étages percés de baies géminées. Le massif transept a été surélevé et fortifié à la fin du Moyen Âge.

La façade occidentale est un des exemples les plus parfaits de l'art roman en Poitou. Annonçant le plan intérieur, des contreforts simples au rez-de-chaussée et jumelés à l'étage font ressortir le jeu des ouvertures. Aux extrémités de la façade, des faisceaux de colonnes à chapiteaux richement sculptés supportent deux clochetons au toit en écailles. Les surfaces planes au bel appareillage décoratif carré, en losanges, en chevrons, en écailles alternent harmonieusement avec les surfaces sculptées.

Le programme iconographique se déploie avec un souci de clarté, d'équilibre et de lisibilité étonnant. Le thème est le Jugement dernier. Les hommes sont évoqués dans la partie inférieure, puis on monte avec les intercesseurs jusqu'au Christ rédempteur. Tout se concentre pour s'élever jusqu'à Lui. Une sculpture romane à la thématique similaire est conservée au musée Sainte-Croix de Poitiers.

Les voussures du portail sont ornées de feuillages, d'animaux stylisés et de scènes des travaux des mois dont certaines sont très mutilées : janvier, un personnage est assis entre deux portes représentant l'année qui se clôt et celle qui commence ; février, un homme se chauffe auprès du feu ; mars, c'est la taille de la vigne ; octobre, on entonne le vin ; novembre, c'est l'abattage du porc ; décembre, le festin.

De part et d'autre de la grande fenêtre, trois statues représentent de bas en haut : un ange, un personnage tenant un livre (saint Jouin ?), une annonciation à droite ; saint Paul, saint Jean et l'Église à gauche.

Au sommet des colonnes jumelées se trouvent deux hauts-reliefs. à droite, Samson domptant le lion qu'il chevauche en lui ouvrant la gueule grâce à sa force, symbole de la victoire du bien sur le mal. à gauche, un cavalier, thème propre à la région Poitou-Charentes dont la signification a donné lieu à de nombreuses interprétations : Constantin, Charlemagne, seigneur local ou réplique en pierre de la statue équestre en bronze (autrefois doré) de Marc-Aurèle au Capitole à Rome.

Au-dessus des fenêtres latérales figurent deux paysans et les symboles des évangélistes : l'ange de Matthieu, le lion de Marc, l'aigle de Jean et le taureau de Luc. Les deux paysans sont flanqués à leur droite de la Luxure aux seins dévorés par des serpents.

Enfin, au fronton, une composition magistrale évoque le Jugement dernier. Le Christ en majesté adossé à la croix est entouré d'anges sonnant trompette. Il a les mains ouvertes en signe d'accueil. Au pied de la croix prennent place deux pèlerins agenouillés et la Vierge médiatrice. En dessous, en une magnifique frise, deux cortèges de paysans, de moines et de seigneurs s'avancent vers la Vierge implorant son intercession. C'est une vision paisible du Jugement dernier qui n'a rien à voir avec les versions redoutables où sont représentés les élus et les damnés.

Dans la scène de l'Annonciation, la Vierge, surprise par la visite de l'ange, laisse glisser sa quenouille de sa main droite. La frise du cortège des élus est animée et pittoresque. Ils avancent d'un pas décidé vers la Vierge, quelques-uns se retournent vers leurs compagnons qui, étonnés, lèvent les bras.

Cette façade et son programme ne sont pas sans faire penser à ceux de Notre-Dame-la-Grande de Poitiers.

Airvault

La construction de l'ancienne abbatiale romane Saint-Pierre, devenue église paroissiale, a été entreprise sous l'abbatiat de Pierre de Saine-Fontaine venu réformer l'abbaye qui avait été fondée au Xe siècle. Elle s'est déroulée de 1050 à 1100 environ. Lors des restaurations en 2002, le parvis de l'église a été excavé jusqu'au sol d'origine. La façade a été complétée et les vieillards de l'Apocalypse que l'on trouve sur la voussure du portail central sont une interprétation contemporaine à partir du moulage d'un claveau ancien. Dans la niche au-dessus du portail de gauche se trouvent les restes d'une grande figure équestre, image propre à la région Poitou-Charentes, dont la signification a donné lieu à de nombreuses interprétations : Constantin, Charlemagne, seigneur local ou réplique en pierre de la statue équestre en bronze (autrefois doré) de Marc-Aurèle au Capitole à Rome. Le premier portail roman a été doté ultérieurement d'un avant-corps formant narthex, unique en Poitou. Ce narthex possède un vaisseau central et des bas-côtés voûtés d'arêtes, formule reprise à l'étage qui ouvre sur la nef. Les piles du narthex sont carrées et massives. Au centre, elles portent un arc en plein-cintre décoré de billettes. Certains chapiteaux sont décorés de feuilles d'acanthe grasses et d'animaux fabuleux. La base d'un pilier de droite est décorée d'animaux (lion, taureau, oiseau).

à l'intérieur, le plan de l'église est traditionnel avec une nef à bas côtés, un transept très large sur les bras duquel s'ouvrent une absidiole et un important chœur à déambulatoire et chapelles rayonnantes. La nef et le chœur ont reçu au XIIIe siècle des voûtes gothiques du type « Plantagenêt » ; les murs ont alors été percés de larges baies.

Nous nous attarderons sur la sculpture intérieure. Les demi-colonnes qui soutiennent la voûte de la nef sont cantonnées de chaque côté par des consoles sculptées en fort relief de masques d'animaux ; elles supportent des statuettes. On s'interroge sur la signification de ces personnages : moines, saints et saintes ? Certains tiennent des livres. Les chapiteaux sont d'une incroyable variété ; certains sont décorés de feuillages ; d'autres sont historiés. L'ensemble tend à illustrer le combat entre le Bien et le Mal : les statuettes portées par des monstres comme les chapiteaux historiés. On remarquera en avançant dans la nef d'ouest en est :

Sur le côté nord :

Sur le côté sud :

Les chapiteaux du chœur sont d'une extrême qualité. Les deux piles du centre montrent, d'une part, la création d'Ève à partir de la côte d'Adam, la tentation et la faute, l'expulsion du Paradis et, d'autre part, les travaux des mois : le travail de la terre, les semailles, la récolte...

Les autres chapiteaux sont décorés de magnifiques feuillages dans lesquels viennent se nicher des animaux fantastiques ou des masques d'où sortent des langues immenses.

Melle

La ville de Melle, située sur l'un des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle, possède trois églises romanes.

Le musée de Niort conserve une sculpture représentant un pèlerin agenouillé. Il porte le costume des gens du peuple, bliaud recouvert du sayon avec capuchon. Il est reconnaissable à sa besace de forme trapézoïdale décorée de la coquille, emblème distinctif des pèlerins de Saint–Jacques–de–Compostelle.

Saint-Savinien

Saint-Savinien, la plus ancienne et la plus austère, est la seule à être située dans l'enceinte de la ville ; elle a servi de prison de 1801 jusqu'à 1927. Des travaux de rénovation ont été entrepris à partir de 1960 et l'église abrite maintenant un centre culturel. Remarquez le linteau en bâtière du portail, exceptionnel pour la région mais courant en Auvergne. Il représente un Christ en gloire entre deux lions.

Le lion est un animal que les sculpteurs de l'Âge roman ont particulièrement aimé représenter, symbole de force et de courage. Les musées de la région conservent toutes sortes de représentations du lion.

Au-dessus du portail prend place une corniche à modillons et métopes sculptés d'animaux fabuleux. La dernière métope à droite présente un homme et une femme nus s'enlaçant.

À l’intérieur, notez les chapiteaux sculptés de la croisée : David ou Samson, un homme luttant contre un griffon, le Christ bénissant tenant un livre sur lequel est inscrit Pax Vobis, le martyre de saint Savinien.

Saint-Pierre

Saint-Pierre est situé hors les murs au nord de la ville sur un escarpement dominant la vallée de la Béronne. Le plan et l'élévation sont des plus classiques pour la région : nef à collatéraux de cinq travées, transept, chevet à abside et absidioles. Le chœur est couvert d’une voûte en berceau, les absides en cul de four, la croisée du transept d’une coupole sur trompe et la nef et les collatéraux en berceau brisé. À l’extérieur le chevet est particulièrement soigné. L'étagement des volumes est harmonieux et traduit l'aménagement intérieur. Les fenêtres à colonnettes ont reçu un décor sculpté de feuillages et les modillons de la corniche sont pleins de fantaisie.

L'entrée principale de l'église se fait par le sud, du côté de la ville. Au-dessus du portail, sous une arcature, le Christ assis est entouré de saint Pierre et de saint Paul. Les modillons de la corniche qui supportent l'arcature sont sculptés et représentent un Christ, fortement endommagé, entouré des symboles des évangélistes : l'ange de Matthieu, le lion de Marc, l'aigle de Jean, le taureau de Luc. Les métopes sont ornées de figures en haut-relief. De gauche à droite, nous découvrons un sagittaire, une scène de chasse, un animal transpercé d'une flèche, les poissons du zodiaque, des animaux difficilement identifiables et enfin un sagittaire.

L’intérieur frappe par son harmonie et son équilibre. Les chapiteaux sont sculptés de motifs de feuillages en plus ou moins haut-relief et de scènes historiées.

à l'entrée du chœur ils représentent des lions affrontés et des sirènes-oiseaux à tête humaine, puis, en remontant au sud, un tireur d'épine inspiré de l'Antiquité.

Au nord prennent place des feuillages et un masque humain barbu, Nicodème et Joseph d'Arimathie mettant le Christ au tombeau (?), un ange à phylactère d'une grande qualité, deux oiseaux montés dans une barque, un dragon, un monstre à tête unique et deux corps, un personnage marchant dans des rinceaux.

Saint-Hilaire

C'est la plus vaste et la plus connue de la triade melloise. Elle a été classée Patrimoine mondial de l'humanité par l'UNESCO en 1998 au titre d'étape sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle.

Son plan facilitait la circulation des pèlerins : nef de six travées à collatéraux, transept à absidioles orientées, chœur à déambulatoire sur lequel s’ouvrent à trois chapelles rayonnantes. Elle a été construite en deux étapes : le sanctuaire et le transept autour de 1 100, puis la nef pendant le troisième tiers du XIIe siècle.

Le musée de Poitiers conserve un plan dressé par Henri Deverin (1846-1921), architecte des Monuments Historiques.

Le chevet très sobre est remarquable par l’étagement des volumes, absidioles et chapelles rayonnantes, déambulatoire, chœur et transept dominés par le clocher carré.

Le portail le plus emprunté et par lequel arrivaient les pèlerins est situé sur le flanc nord de la nef. Il est particulièrement soigné et surmonté d'une niche dans laquelle figure en ronde-bosse un cavalier couronné foulant aux pieds un petit personnage. Ce groupe a été très restauré et modifié au XIXe siècle. Des vestiges de la sculpture, retrouvés en 1984, les archives et les relevés laissent entendre qu'il s'agirait d'un seigneur local du nom de Constantin qui se serait proclamé « défenseur de l'Église » et « protecteur de la population ». Le musée de Poitiers conserve une vue du portail datée de 1843 (avant restauration) montrant le cavalier dans une toute autre attitude.

Ce portail possède trois voussures très abimées. La première est ornée d'un décor de palmettes réalisé à la fin du XIXe siècle. Sur la deuxième sont présentés en alternance les travaux des mois et les signes du zodiaque. La troisième est dédiée au combat des Vices et des Vertus associé à une évocation de la Luxure (deux femmes nues, l'une aux seins dévorés par deux chimères, l'autre reposant sur des crapauds). Le mur est rythmé par d'élégantes colonnes-contreforts jumelées. Les cintres des fenêtres sont soigneusement sculptés ainsi que les chapiteaux ornés de monstres et de personnages. Les modillons de la corniche sont travaillés avec beaucoup de finesse.

La façade occidentale de Saint-Hilaire est typiquement poitevine : un portail central encadré de deux arcatures aveugles, au-dessus trois baies, celle du centre étant plus grande que les autres, le tout surmonté d'un fronton encadré de deux lanternons. La simplicité du décor, limité à l'étage supérieur, est constitué uniquement de motifs géométriques et donne à cette façade une grande monumentalité.

Quand on pénètre dans l'église par le portail occidental, le contraste est frappant entre la nef baignée de lumière (double baie à chaque travée) et le sanctuaire dans la pénombre qui, éclairé par d'étroites fenêtres, paraît lointain, secret et mystérieux.

Des piles quadrilobées supportent les voûtes en berceau brisé de la nef et des collatéraux. Leurs chapiteaux sont le domaine d'une sculpture où se déploient formes géométriques, animaux, feuillages, scènes de la vie quotidienne et historiée. Certains sont d'un style vigoureux : la chasse au sanglier, l'Arbre de vie, le centaure-sagittaire perçant d'une flèche un cerf.

D'autres sont plus raffinés et décoratifs : joueurs de vielle à archet et acrobate à la renverse ; joueurs de harpe ; quadrupèdes affrontés au-dessus d'une ornementation végétale ; oiseaux buvant dans une même coupe ; personnages nus dans des rinceaux ; dragons affrontés : corps de coq avec queue de serpent donnant lieu à des enroulements décoratifs.

Dans l'axe du portail nord s'ouvre le portail sud dont la particularité est d'être sculpté sur la face interne et non externe. Le pèlerin qui quittait l'édifice était conduit à contempler la voussure dont chaque claveau est constitué de personnages de l'Ancien et du Nouveau Testament marchant allégrement (évocation des pèlerins ?) vers la figure du Christ bénissant. On reconnaît un abbé avec sa crosse, Moïse portant les Tables de la Loi, saint Pierre avec ses clés. En dessous, des animaux fantastiques inspirés des bestiaires montrent la richesse du répertoire ornemental des imagiers de l'époque.

Les bras du transept sont couverts de berceaux plein-cintre, la croisée d'une coupole octogonale sur trompe sur cintre, les absidioles de cul-de-four ainsi que le chœur et les chapelles rayonnantes. Le déambulatoire est couvert de voûtes d'arêtes sans doubleaux. Les chapiteaux du sanctuaire ont été restaurés au XIXe siècle de manière radicale. On remarquera néanmoins ceux des colonnes de la croisée du transept qui sont décorés de feuillages et d'animaux fantastiques ; le tailloir de l'un d'eux est gravé d'une dédicace « facere me Aimericus rogavit » (Aimery a demandé que l'on me fasse).

Javarzay (Commune de Chef-Boutonne)

Javarzay, autrefois châtellenie indépendante, est devenue aujourd'hui un faubourg de Chef-Boutonne. Son église aux proportions imposantes est dédiée à saint Chartier, saint berrichon qui aurait vécu au VIe siècle.

La nef à collatéraux et le transept ont été construits vers 1140 tandis que le chœur a été entièrement refait au début du XVIe siècle. La structure architecturale datant de l'Âge roman rappelle celle de Saint-Pierre d'Aulnay en Charente-Maritime, édifice prestigieux, joyau du Poitou roman, classé Patrimoine mondial par l'UNESCO dans le cadre des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle.

L'ample façade est rythmée verticalement par quatre imposants contreforts et horizontalement par une corniche qui détermine deux niveaux. Le portail central à quatre voussures toriques est flanqué de part et d'autre d'une double arcature aveugle, l'ensemble est surligné par un cordon en pointes de diamant. Les chapiteaux sont décorés de masques et de feuilles creuses, les tailloirs ornés de feuillages, d'étoiles et de disques. La puissante corniche est composée de modillons et de métopes sculptés : au centre, l'Agneau mystique, image du Sauveur, accosté d'une chouette et, de part et d'autre, de palmettes, rosaces, étoiles, oiseaux et un personnage en marche portant un bourdon sur l'épaule. Au-dessus du portail, une fenêtre à colonnettes éclaire la nef.

Haute de treize mètres et longue de quatre travées, la nef est voûtée en berceau brisé ainsi que les collatéraux et les bras du transept. Arcs et arcs-doubleaux reposent sur des piles fasciculées à huit colonnettes.

La croisée du transept est couverte par une coupole sur pendentif à grosses nervures toriques. Remarquez l'appareil réticulé très décoratif des pendentifs. Le cordon de dents de loup qui les soulignent est repris à la base de la coupole.

Les chapiteaux de la nef et des collatéraux sont sculptés de feuilles d'eau où se dégagent des volutes de feuillages, de poissons, d'oiseaux juchés sur des lions becquetant leur tête ou leur croupe, de quadrupèdes dont un lièvre et des têtes de chèvres, de têtes humaines dans une verve populaire.

Le musée de Niort possède une pierre tombale du XIIe siècle provenant des fouilles réalisées près du cimetière. En forme de bâtière, elle est décorée d'épisodes de la vie seigneuriale : d'un côté, une scène de chasse où l'on voit un couple s'adonnant à la chasse à courre au faucon ; la scène se prolonge sur l'autre face où elle est complétée par la figuration d'un jeu de trictrac.