Église Saint-Pierre d'Airvault
La construction de l'ancienne abbatiale romane Saint-Pierre, devenue église paroissiale, a été entreprise sous l'abbatiat de Pierre de Saine-Fontaine venu réformer l'abbaye qui avait été fondée au Xe siècle. Elle s'est déroulée de 1050 à 1100 environ. Lors des restaurations en 2002, le parvis de l'église a été excavé jusqu'au sol d'origine. La façade a été complétée et les vieillards de l'Apocalypse que l'on trouve sur la voussure du portail central sont une interprétation contemporaine à partir du moulage d'un claveau ancien. Dans la niche au-dessus du portail de gauche se trouvent les restes d'une grande figure équestre, image propre à la région Poitou-Charentes, dont la signification a donné lieu à de nombreuses interprétations : Constantin, Charlemagne, seigneur local ou réplique en pierre de la statue équestre en bronze (autrefois doré) de Marc-Aurèle au Capitole à Rome. Le premier portail roman a été doté ultérieurement d'un avant-corps formant narthex, unique en Poitou. Ce narthex possède un vaisseau central et des bas-côtés voûtés d'arêtes, formule reprise à l'étage qui ouvre sur la nef. Les piles du narthex sont carrées et massives. Au centre, elles portent un arc en plein-cintre décoré de billettes. Certains chapiteaux sont décorés de feuilles d'acanthe grasses et d'animaux fabuleux. La base d'un pilier de droite est décorée d'animaux (lion, taureau, oiseau).
À l'intérieur, le plan de l'église est traditionnel avec une nef à bas côtés, un transept très large sur les bras duquel s'ouvrent une absidiole et un important chœur à déambulatoire et chapelles rayonnantes. La nef et le chœur ont reçu au XIIIe siècle des voûtes gothiques du type « Plantagenêt » ; les murs ont alors été percés de larges baies.
Nous nous attarderons sur la sculpture intérieure. Les demi-colonnes qui soutiennent la voûte de la nef sont cantonnées de chaque côté par des consoles sculptées en fort relief de masques d'animaux ; elles supportent des statuettes . On s'interroge sur la signification de ces personnages : moines, saints et saintes ? Certains tiennent des livres. Les chapiteaux sont d'une incroyable variété ; certains sont décorés de feuillages ; d'autres sont historiés. L'ensemble tend à illustrer le combat entre le Bien et le Mal : les statuettes portées par des monstres comme les chapiteaux historiés. On remarquera en avançant dans la nef d'ouest en est :
Sur le côté nord :
- saint Georges terrassant le dragon ;
- une scène de duel ; des cavaliers en file : leur crinière et leur harnachement sont particulièrement soignés ;
- une scène de funérailles : le corps est étendu sur un lit porté par deux hommes, un moine les précède avec l'eau bénite ;
- une scène dite « l'école du savoir » : surplombant des masques d'hommes reliés entre eux par des rinceaux et aux oreilles grandes ouvertes, un homme sensiblement plus âgé semble parler ;
- les noces de Cana : derrière une table dressée, une femme entre deux convives montre un poisson, emblème du Christ. Sur le côté, des jarres vides sont entassées et un serveur apporte du vin ;
- un chapiteau au tailloir richement sculpté est décoré d'entrelacs dans lesquels s'épanouissent des pommes de pin ;
-
Daniel dans la fosse au lion : au centre,
Daniel barbu
soutient le tailloir du
chapiteau,
ses jambes sont retournées. De chaque côté,
des lions tournent la tête vers lui. Dans
l'absidiole
nord et sur le côté sud se voit également
Daniel dans la fosse au lion :
- dans l'absidiole nord, il est nu et porte le collier que lui a donné Balthazar ; ses pieds sont dans la gueule d'un lion couché et deux autres lions sont dressés de part et d'autre de lui ;
- côté sud, il est étendu près des lions .
Sur le côté sud :
- une scène avec le phénix oiseau mythique qui renaît de ses cendres, symbole d'éternité ; à droite, une femme avec un linge pendu à son bras ; au centre, personnage serrant un livre sur sa poitrine . Les personnages semblent s'envoler. S'agit-il d'une évocation de la résurrection ?
- un chapiteau montre des oiseaux picorant des pommes de pin tandis qu'un personnage d'angle soutient de ses bras levés le tailloir du chapiteau ;
- un chapiteau est décoré de sirènes symbolisant la Luxure.
- Dans le croisillon sud, le chapiteau dit « du retournement » montre une femme en orante, symbole de l'Église ; à sa gauche, un homme est écrasé par le péché ; à sa droite, un homme dépouillé opère son retournement.
Les chapiteaux du chœur sont d'une extrême qualité. Les deux piles du centre montrent, d'une part, la création d'Ève à partir de la côte d'Adam , la tentation et la faute, l'expulsion du Paradis et, d'autre part, les travaux des mois : le travail de la terre , les semailles, la récolte...
Les autres chapiteaux sont décorés de magnifiques feuillages dans lesquels viennent se nicher des animaux fantastiques ou des masques d'où sortent des langues immenses.