Chapelle des templiers de Cressac
Chapelle des templiers
La chapelle des Templiers à Cressac, établie sur un promontoire dominant la vallée du Né, peut paraître bien modeste au premier abord. Elle a l’austérité des constructions de l’ordre du Temple, caractérisées par la simplicité du plan (un rectangle) et l’absence de décor sculpté à l’exception d’une moulure ornée de feuillages qui règne au-dessus des trois fenêtres du chevet. La chapelle possédait un ensemble de fresques dont une partie, préservée, est d’un intérêt majeur, car elle décrit un épisode des croisades.
De plus, le musée d'Angoulême possède les relevés effectués par Eugène Sadoux sous formes d'aquarelles en 1871. Relativement fidèles, elles sont d'autant plus intéressantes qu'elles révélent certains détails de la fresque aujourd'hui perdues. Ici détail du musicien en haut à gauche de la fresque : interprétation de l'artiste ou véritable relevé d'un fragment disparu ?
Les fresques paraissent contemporaines de la construction de la chapelle, c’est-à-dire la deuxième moitié du XIIe siècle.
Pour délivrer le Saint-Sépulcre de Jérusalem et protéger les Chrétiens d’Orient, le pape Urbain II prêcha, en 1095, la première croisade qui aboutit à la prise de Jérusalem, en 1099, par Godefroi de Bouillon et au couronnement de son frère Baudouin comme roi de Jérusalem en 1100. Les pèlerins pouvaient à nouveau circuler. Afin d’assurer leur sécurité, Hugues de Payens fonda à Jérusalem, en 1119, un ordre de moines-soldats. Ces moines établis dans le Temple de Salomon, lieu symbolique où se trouve l’actuelle mosquée Al-Aqsa, ont pris le nom de Chevaliers du Temple ou Templiers. L’histoire des Templiers se confond avec celle des croisades en Terre Sainte et de la Reconquête en Espagne. Avec le temps, l’ordre a prospéré et accumulé des richesses qui lui permettaient d’assumer un rôle de banquier auprès des papes ou des rois, et lui donnaient une véritable puissance. Lorsque l’empire romain d’Orient est tombé aux mains des Musulmans, les Templiers durent quitter la Terre Sainte et rentrèrent en Occident. En France, ils se heurtèrent au roi Philippe le Bel qui, convoitant leurs richesses, s’employa à les discréditer ; il fit arrêter les membres de l’ordre, les soumit à l’Inquisition et, sous la torture, amena un grand nombre d’entre eux à avouer toutes sortes de forfaits. Le roi obtint du pape Clément V la suppression de l’ordre en 1312 et, deux ans plus tard, l’exécution, par le bûcher, du grand maître Jacques de Molay et du commandeur de Normandie. Malgré les calomnies qui ont terni la renommée des Templiers, les historiens reconnaissent maintenant leur compétence à gouverner et à administrer leur ordre, leur rôle international dans le domaine du commerce et des finances et leur réelle valeur militaire qui permit des victoires décisives.
C’est l’une de ces batailles, la victoire remportée en 1163 par les Croisés dans la plaine de La Bocquée au pied du Krak des Chevaliers, qui est décrite sur le mur nord de la chapelle de Cressac. Au registre supérieur, les habitants regardent du haut des remparts crénelés les Croisés sortir calmement de la ville tandis que, plus loin, sur un fond parsemé de fleurs de lis et de croissants, l’un d’eux charge les Sarrasins qui se réfugient dans une ville.
Le retentissement de cette victoire a été particulièrement profond dans la région, car l'armée
des Croisés comprenait un contingent de chevaliers charentais, dont le frère du comte
d’Angoulême, Geoffroy Martel, qui s'était distingué au cours des opérations. Au registre
inférieur, des scènes de combat encadrent un campement de Sarrasins. Un
soin particulier a été apporté à la description de l’armement des protagonistes et facilite leur
identification : rondache (bouclier rond) et selle à pommeau pour les
Sarrasins ; écu oblong, haubert (cotte de
maille), casque à nasal, selle surélevée pour les Francs. Les coloris sont limités à l’ocre, le
brun et le blanc ; les silhouettes sont cernées d’un trait épais ; des lignes brun
rouge soulignent le modelé, les plis des vêtements et l’armement.
Au revers de la façade et à gauche de la fenêtre, un chevalier à pied, muni d’une épée et d’un écu, est
une représentation probable de saint Georges s’apprêtant à combattre le monstre qui lui fait
face pour protéger une femme, richement vêtue et couronnée, derrière lui.
En parallèle, à droite de la fenêtre, un chevalier couronné foule sous les sabots de son cheval
un petit être devant une femme également couronnée. Il s’agit sans doute d’une allusion
symbolique à la victoire de la Chrétienté sur l’Islam, interprétée comme un triomphe sur le
paganisme. Sur les façades des églises de la région, il est fréquent d’observer des cavaliers
foulant un personnage. Ce thème est propre à la région Poitou-Charentes. Beaucoup ont disparu,
cependant il en reste quelques-uns en place quoique mutilés comme, par exemple, celui de
Châteauneuf-sur-Charente.
Dans l’ébrasement de la fenêtre, côté droit, une barque montée par deux bateliers est peut-être une allusion à la traversée de la mer par les Croisés.
Sur le mur du fond, un évêque est identifié par certains historiens comme étant Adémar, évêque d’Angoulême, qui prit part à une expédition contre les Sarrasins d’Espagne. Cet ensemble de peintures murales paraît contemporain de la construction de la chapelle dans la seconde moitié du XIIe siècle.
Notre-Dame de Cressac
Ne manquez pas d’aller voir, dans le bourg à quelques kilomètres, l’église paroissiale Notre-Dame édifiée dans les dernières années du XIe siècle. Elle est construite en moellons, ce qui constitue un archaïsme ; en revanche, la façade à deux niveaux est habillée d’un parement de pierres de taille. Le portail, centré et placé entre deux hautes arcatures latérales, est orné de colonnes à chapiteaux sculptés. Au-dessus, le mur aveugle est rythmé par des contreforts plats. Le clocher est éclairé par des baies en plein-cintre. Le plan de l’édifice est très simple, une nef, une travée sous le clocher et une abside. La nef, à l’origine couverte d’une charpente, a reçu une voûte en brique au XIXe siècle. L’abside est animée par une série d’arcatures qui s’élève sur toute la hauteur du mur. À l’extérieur, le chevet est couronné d’une corniche à modillons sculptés. Le style de la sculpture de l’édifice, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, est très homogène bien qu’il s’exprime avec une certaine maladresse : entrelacs, feuillages, masques, silhouettes animales et humaines.